Le jeu libre comme proposition d'intervention non médicamenteuse en Ehpad (INM) 

Les interventions non médicamenteuses ou INM sont proposées pour stimuler les fonctions cognitives, motrices, comportementales pour des personnes souffrant de maladie liée au vieillissement notamment. La médiation par le jeu, avec le cadre ludique qu'elle propose, s'inscrit dans cet objectif. 

L'étude Ludim qui a été menée auprès de 54 patients vivant en unité Alzheimer au sein d'Ehpad a démontré les éléments suivants : 

- une amélioration de la qualité de la vie et du bien-être des résidents par une amélioration de la communication non verbale entre le patient et son entourage.

- une nette diminution des troubles du comportement les plus problématiques.

De part ces résultats positifs, l'étude Ludim suggère que le jeu, selon l'approche du cadre ludique, pourrait constituer une intervention non médicamenteuse efficace dans la prise en charge des symptômes psychologiques et comportementaux des patients atteints de maladies de type Alzheimer (1)

Ce cadre ludique nécessite une mise en place bien définie en amont, réfléchie en équipe selon des éléments nécessaires pour une visée thérapeutiques et d'autres plus contextuels à chaque structure. : quelle population, quels professionnels, quels jeux, quel lieu, quel cycle. 

La définition du jeu :  

Pour Roger Callois, le jeu est une activité : 

• libre (on ne peut y être obligé)

• incertaine (on n'en connait pas l'issue)

• séparée (une cadre la délimite dans le temps et dans l'espace)

• fictive (on se détache de la réalité)

• improductive ( elle ne produit rien)

• réglée (le comportement est ordonné, par une règle donnée ou inventée)

"On peut donc, en bref,  définir le jeu comme une action libre, sentie comme fictive et située en dehors de la vie courante, capable néanmoins d'absorber totalement le joueur" (Huizinga, 1951)

Les indications :

Le jeu libre vise en priorité le bien-être et le plaisir éprouvé par les joueurs, avec les effets positifs que cela induit sur l'estime de soi, l'envie de faire, l'action.

C'est cette première intention qui rend possible dans un deuxième temps les bénéfices tels que la stimulation et la préservation des : 

- habiletés sociales et culturelles : autonomie, créativité, acceptation de la règle, maîtrise de ses émotions, , coopération, association, prise de décision, endurance

- habiletés sensorielles et motrices : motricité fine et motricité globale

- habiletés cognitives : mémoire, langage, attention, orientation, fonctions exécutives (initiative, mémoire de travail, contrôle inhibiteur, flexibilité cognitive)

Mise en œuvre du cadre ludique pour un accompagnement en jeu libre : 

Un travail en équipe est nécessaire au préalable entre le ludothérapeute et les professionnels de santé, en accord avec la famille, pour identifier l'ensemble des éléments qui permettront la bonne mise en place du cadre ludique.   

Les joueurs : quels joueurs sont concernés, quelles sont leurs capacités, quelles situations peuvent les mettre en difficulté. On privilégiera un groupe stable pour une meilleure identification de chacun durant tout le cycle. 

Le lieu des séances : idéalement, on utilise une pièce destinée uniquement au jeu, une sorte de « salon de jeux » où les jeux sont installés selon un ordre ritualisé que les joueurs retrouvent à chaque séance, pour se sentir en sécurité dans un environnement connu, rassurant et bienveillant. Les jeux sont installés en prêt-à-jouer pour favoriser l'entrée en jeu. Des pôles sont organisés par catégories de jeu pour faciliter leur repérage par les joueurs.

Dans la mesure du possible, la pièce sera calme, préservées d’interventions extérieures avec la possibilité d’isoler par des paravents ou cloisons les espaces de jeux symboliques des jeux plus bruyants.

Les professionnels : au départ, le ludothérapeute et au moins un professionnel de santé sont nécessaires pour animer une séance de jeu libre. L’un tient le rôle d’observateur et reste toujours disponible, les autres sont plus proches des joueurs. Les rôles peuvent changer au fur et à mesure des séances. Le temps de travail en équipe comprend une formation à cette animation pour garantir la bonne posture de chaque professionnel : donner à jouer, intervenir le moins possible, laisser jouer, observer. Une fois formé, le personnel de la structure peut évoluer en toute autonomie dans l'animation des séances de jeu-libre.

Le choix des jeux et des jouets : de manière générale, les jeux balayent les 4 catégories de jeux proposés par le système de classement ESAR (Exercice, Symbolique, Assemblage, Règles) avec différents niveaux de difficulté. Bien sûr selon les capacité et besoins des joueurs, telle ou telle catégorie sera favorisée ; la sélection pourra également être adaptée selon les observations faites en cours de séance.

Durée des séances : entre 45 mn et 1 heure

Fréquence et durée d’un cycle : 1 à 2 fois par semaine pour un cycle de 8 à 10 semaines

Nombre de joueurs : entre 4 et 10 joueurs

Evaluation des séances : des fiches d’évaluation sont renseignées en fin de chaque séance, ainsi qu’à la fin de chaque cycle : on évalue le cadre ludique dans son ensemble, car c’est lui qui permet la bonne tenue des séances. Les critères d’évaluation concernent donc les jeux, le lieu, la posture des professionnels. L’évolution du comportement des résidents sera évaluée en cours de jeu et dans la vie quotidienne, en lien avec les professionnels de santé.

Contre-indications : on ne parle pas véritablement de contre-indication mais plutôt de points de vigilance à avoir quant au choix des objets ludiques :

- veiller à proposer des objets non infantilisants.

- éviter les petites pièces pouvant être ingérées.

- préférer des matériaux nobles, solides, aux couleurs vives, aux contrastes bien marqués.

- privilégier des jeux à forte affordance pour faciliter l’engagement dans le jeu dès la première séance.

Toutefois, pour des personnes présentant des troubles sévères du comportement, il sera judicieux de proposer des séances en tout petit groupe et plus limitées dans le temps, avec une sélection de jeu plus réduite.

(1) Soins Gérontologie, Démence et thérapeutique non médicamenteuse, efficacité du cadre ludique. 2017. 

Formation des professionnels : 

N'hésitez pas à me contacter pour la formation de vos équipes.